mercredi 22 juin 2022

Catalogue

 


Silence sur le Plateau Mont-Royal


Une série d’intrigues se noue autour d’un groupe d’arrivistes, anciens contestataires pour la plupart, dans leur ghetto petit-bourgeois du Plateau Mont-Royal. Ayant tous plus ou moins accepté les compromissions les plus diverses par rapport à leurs idéaux de jeunesse, ils essaient chacun à sa façon d’endormir leurs remords comme ils le peuvent. La plupart choisissent d’apaiser leur mauvaise conscience avec de l’argent, mais d’autres, qui gardent une certaine intégrité, éprouvent plus de difficultés à se réconcilier avec la trahison de leurs idéaux passés et des valeurs fondamentales auxquelles ils croyaient tous. L’un d’eux, un peintre, écrivain à ses heures, qui ne doit sa renommée qu’à des contacts bien nantis, et certes pas à son talent personnel, est de plus en plus tiraillé par sa conscience. Son malaise s’accroît au point où il s’ouvre de son tourment auprès de ses amis les plus proches. Qu’il s’agisse des fonctionnaires, enseignants, relationnistes, banquiers, médecins ou psychologues qui forment son cercle d’amis, aucun ne semble comprendre la source de ses tourments. En apparence, tous tendent une oreille compatissante, mais le peintre n’arrive pas à trouver chez eux un écho à ses propres incertitudes. Même sa maîtresse, l’épouse d’un de ses amis, ne lui apporte aucun réconfort. Bien au contraire, il découvre que leur relation est connue du mari qui s’en accommode fort bien, cela lui donnant davantage de temps afin de fréquenter sa propre maîtresse. De plus en plus dégoûté par l’hypocrisie universelle, le peintre finit par se suicider un soir de désespoir total. Aux funérailles, le groupe d’amis est étonné de voir arriver une jeune femme qui prétend être la fille du défunt. Elle leur donne rendez-vous à chacun, sans leur indiquer de date, disant qu’elle viendra les voir chacun son tour. Graduellement, après s’être infiltrée dans leur intimité, elle séduit les hommes et les femmes indistinctement dont elle a, en moyenne, la moitié de l’âge. Graduellement, les passions se déchaînent tandis que la possessivité met en péril la cohésion du cercle d’amis, chacun réclamant pour soi la jeune femme. Les couples se retrouvent en crise, les amitiés tournent à l’aversion marquée. Jusqu’à ce que la maîtresse du peintre aille rendre visite à la jeune femme chez elle, pour découvrir qu’elle est inconnue à son adresse. Confrontée par l’ensemble du groupe une nuit sans lune, elle se dévoile à eux comme étant la mort venue les chercher. Devant les protestations à l’effet qu’ils n’ont nullement terminé leur vie, la mort pose à chacun d’entre eux la même question afin de leur permettre de prolonger leur existence : « Qu’as-tu fait de ta vie ? » Devant leur incapacité à trouver une réponse, la jeune femme quitte la maison qui est enveloppée à ce moment d’un silence mortel.


 – Sandra Guénette – 292 p. – 1995 – Roman fantastique dont les prémisses réalistes livrent le lecteur tout entier à la finesse et à l’intelligence de l’intrigue. Développée progressivement, celle-ci tisse ses fils avec patience jusqu’au dénouement final qui tombe comme une sentence sans appel. À ne pas lire avec une conscience plus ou moins nette.

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