samedi 31 août 2019

Chocolat au laid




Sans doute avez-vous souligné l’événement avec votre sobriété habituelle. Le 15 août dernier était l’anniversaire de l’accession à l’indépendance de l’Inde.

De nos jours, l’occasion en soi est insuffisante, aussi faut-il que certains en profitent pour engranger un peu de pognon. C’est l’époque qui veut ça. 

Dans ce cas-ci, c’est le confiseur Cadbury qui a lancé sur le marché, là-bas, la friandise Unity (unité). Il s’agit d’une tablette de chocolat comprenant 4 saveurs et qui se voulait représentative de la diversité indienne.

Tollé contre cette friandise qui – disait-on – banalisait d’importants enjeux propres non seulement à l’Inde elle-même, mais également à toute la planète.

Plus important encore, cette réaction négative nous fait comprendre qu’un jour viendra peut-être où les outrés chroniques finiront par se plaindre qu’ils n’ont plus de quoi se plaindre.


vendredi 30 août 2019

Coup de tête




Pendant deux siècles et demi, l’arrogance britannique a fait la leçon à la planète entière. Toute bouffie de ses prétendues valeurs supérieures, elle a pourfendu tous les gouvernements, régimes et sociétés qui n’ont pas su gagner sa faveur. Dans le même temps, la suffisance de la morale anglo-saxonne fut transmise à tous les pays issus de cette racine discutable, de sorte que, partout où l’Union Jack est passé et a fait des petits, le même orgueil a poussé ses héritiers à toujours regarder de haut «les autres».

Combien de fois, depuis l’île de l’Australie jusqu’à l’archipel britannique – en passant par toute l’Amérique du Nord –, n’a-t-on pas entendu quelque anathème dénonçant des carences démocratiques, dans tel ou tel pays? Très souvent, c’étaient d’anciennes colonies de ce fameux empire où le soleil ne se couchait jamais qui, de la sorte, ne reçurent pas l’aval de l’ancienne métropole et de ses rejetons.

On en sait quelque chose, au Québec; entre autres.

Tant que l’histoire est allée à leur avantage, les Britanniques et leurs héritiers ont été très fiers de mettre de l’avant leur attachement aux principes démocratiques et à la légitimité conférée par l’adhésion populaire. Pendant tout ce temps, cela n’a pas été présenté comme de l’opportunisme politique, mais bien comme un trait substantifique du caractère anglo-saxon, ce qui assurait de facto à ce dernier une supériorité morale absolue.

Ainsi, on s’est fait rebattre les oreilles avec des notions aussi fausses que celles du «foyer de la démocratie» pour le Royaume-Uni; de l’«exceptionnalisme états-unien» pour les Yankees; et du récent «premier État postnational» pour le CAnada. Tous ces titres portés comme des médailles en fer-blanc au revers d’un vêtement élimé.

Mais, bien évidemment, le vent finit toujours par tourner et c’est alors que la morale anglo-saxonne révèle son véritable visage: celui de l’abus de pouvoir, comme partout ailleurs. Ces derniers temps, empêtré dans le bourbier du Brexit, le Royaume-Uni n’en finit plus de chercher le moyen de s’extraire de cette crise qu’il s’est fabriquée de toutes pièces. Le plus récent chapitre met en scène un premier ministre pour lequel personne n’a voté qui, avec l'assentiment tacite d’un monarque pas davantage élu, décide unilatéralement de proroger une assemblée souveraine afin d’imposer une mesure impopulaire.

Le dernier, en Grande-Bretagne, à avoir tenté ce genre de chose s’appelait Charles Ier et il a fini décapité en place publique.

Il semblerait que Boris Johnson, lui, a plutôt commencé par perdre la tête.



(Parlant de tête, celle de Cromwell a été empruntée à sa statue érigée à Saint-Ives, au Royaume-Uni.)


jeudi 29 août 2019

L’oxymore vivant




Le président des Stazunis, M. Donald Trompe, est attendu à Varsovie, ce dimanche. En effet, le 1er septembre, on soulignera le début de la Deuxième Guerre mondiale, alors que la Pologne était envahie par l’Allemagne.

Déjà, cela est une fausseté historique, car la guerre ne commencera véritablement que le 3 septembre quand Britanniques et Français la déclareront à l’Allemagne. Et encore, nombre d’historiens ne parleront alors que d’un conflit typiquement européen. Pour eux, ce ne sera qu’en décembre 1941 que la guerre deviendra mondiale, alors que l’empire du Japon attaque Pearl Harbor et qu’Adolf Hitler déclare la guerre aux Stazunis.

Bref, tout ce cérémonial du 1er septembre 2019 n’est que la poudre aux yeux dans un pays qui, depuis sa création en 1919, n’a cessé d’être sous la coupe de régimes autoritaires de droite, sauf, évidemment, de 1945 à 1989.

Un des ténors du retour de la droite – voire de l’extrême droite – en Pologne, M. Lech Walesa, est encore vivant. Chaque fois qu’un pays européen a été la proie d’un soulèvement fomenté par des néo-fascistes, et financé en sous-main par les Yankees, il s’est pointé pour servir d’étendard vivant à cette cause qui lui tient à cœur: le triomphe de la droite la plus autoritaire possible.

Aujourd’hui, il veut inciter les Stazunis à «redevenir l’empire du bien», une modeste demande qu’il entend adresser à Donald Trompe, ce week-end. 

L’«empire du bien»… Tu parles d’un oxymore!



(Sans compter que, avant de le «redevenir», il aurait fallu commencer par l’être.)

mercredi 28 août 2019

Le petit bout de la matraque




Vendredi soir dernier, deux policiers fêtaient la fin de leur harassant quart de travail au restaurant, près de la place Émilie-Gamelin, à Montréal. Alors que, vêtus en civil, ils déambulaient tentant de récupérer après ces heures de dur labeur éreintant qui est le leur, ils furent abordés par un «groupe d’individus» – leur nombre est encore inconnu – qui leur aurait asséné plusieurs coups de poings et de pieds.

Il semble que lesdits vidus auraient reconnu les policiers en civil et auraient décidé de les attaquer. Déjà, ce scénario comporte sa part d’invraisemblances. D’abord, pour «reconnaître» quelqu’un, encore faut-il l’avoir connu précédemment; et qui sait dans quelles circonstances? Autrement dit, si les agresseurs connaissaient les flics aussi bien, les flics devaient en toute logique connaître leurs agresseurs. Ensuite, même s’il s’agit de flics, on n’attaque pas des gens sans raison ni provocation. Alors pourquoi ont-ils été malmenés?

Évidemment, les relations publiques de la flicaille sont montées au créneau pour dénoncer un acte «intolérable et inacceptable». On comprend que, puisqu’il s’agit d’autres flics, ils ne voient – dans ce cas-ci – les choses que par le petit bout de la matraque.

Tout de même, il fait chaud au cœur de constater que les sensibilités des forces de l’ordre peuvent être froissées à ce point lorsque des personnes sont ainsi brutalisées. Il reste à voir comment elles agiront lors de la prochaine manifestation pacifique d’étudiants ou de syndiqués.


Francis Grenier, mars 2012


mardi 27 août 2019

Pompez haut!




Trou d’UQ




Vous n’êtes pas sans savoir que le premier ministre de l’Ontario, M. Doug Ford, avait pratiquement lancé son mandat en annulant le projet de fondation de l’Université de l’Ontario français (UOF), une sorte d’équivalent de l’Université du Québec (UQ). Le motif sous-tendant son geste de mépris à l’endroit des francophones de son pays était que la création d’une telle institution allait créer un énorme trou budgétaire.

Vous vous rappelez aussi le tollé qui avait suivi l’annonce, ainsi que la cabale qui avait vu une des députés du gouvernement quitter le Parti conservateur de l’Ontario avec fracas. Un tel branle-bas, que M. Ford avait dû surseoir à sa décision et remettre le projet de l’UQ ontarienne sur les rails.

Alors, maintenant, suivez le raisonnement.

En ce moment, M. Ford fait des pieds et des mains afin de régler ce dossier auprès d’Ottawa. C’est-à-dire qu’il tente d’en venir à un accord avec le fédéral afin que ce dernier accepte de financer une bonne part de l’Université durant les 8 premières années*.

Pourquoi tant d’empressement? Parce qu’il y aura bientôt des élections au CAnada et que M. Ford, en bon conservateur, sait que si la question n’est pas réglée pour les 8 prochaines années, cela risque de constituer une épine dans le flanc du chef du Parti conservateur du CAnada, M. Andrew Scheer, ce dernier ayant déjà commencé à tapiner au Québec qui se soucie tout de même du sort du français, à tout le moins dans les autres provinces.

Bref, il s’agit de faire payer les libéraux afin de faciliter l’élection des conservateurs.

M. Ford est peut-être obtus, égoïste, exclusif et xénophobe, mais il n’est pas aussi idiot qu’il en a l’air.

À moins, bien entendu, que l’idée vienne d’un de ses conseillers…



*Pourquoi pendant 8 ans? Parce que, après deux mandats, un éventuel gouvernement conservateur aura probablement perdu le pouvoir et la patate chaude de la question linguistique reviendra aux libéraux.


lundi 26 août 2019

«Choisir d'avancer» (sic)




Bol-snoreau




Grosse tempête sur les réseaux sociaux, dernièrement, avec, comme principaux protagonistes, Jaim Bolsonaro, président du Brésil, et Emmanuel Macron, président français ainsi que, accessoirement, clone du fils de Pierre Elliott Trudeau. 

Tout a commencé quand M. Macron a mis en garde contre les incendies qui ravagent la forêt amazonienne, laquelle se situe principalement en territoire brésilien.

Réaction immédiate de Brasilia qui a traité Emmanuel de «colonialiste», sans doute parce qu’il se mêlait des affaires internes d’un autre pays. Soulignons en passant que, tandis que la jungle partait en fumée, M. Bolsonaro s’appliquait à faire ce que les fascistes dans son genre font le mieux: attendre que le problème finisse par disparaître de lui même; quel que soit l'incendie, les matraques n’éteignent rien du tout.

Rebelote lors du sommet du G7, alors que la question des feux de forêt a été ramenée sur la table, ce qui a attisé – sans mauvais jeu de mots – la fureur du président Bolsonaro et de son entourage.

Résultat, tout ce petit monde est monté au créneau pour traiter Emmanuel Macron de tous les noms: «crétin», «idiot», «tricheur». Même la compagne de ce dernier a fait l’objet de remarques désobligeantes.

Il n’empêche, depuis, le Brésil s’est résolu, à contrecœur, à accepter l’aide internationale et à tenter, bien tard, de combattre l’élément destructeur.

En conclusion, on comprend qu’un gouvernement goûte peu qu’on lui dicte sa ligne de conduite. Cela ne l’excuse pas pour autant de révéler sur la place publique des secrets, fussent-ils de Polichinelle.


dimanche 25 août 2019