samedi 25 décembre 2021
vendredi 24 décembre 2021
Catalogue
Le Couteau aztèque
Symbole de la réussite, bardé de diplômes des institutions les plus prestigieuses en histoire, en anthropologie et en muséologie, Clarence est un homme aux prises avec les affres de la quarantaine. Ayant récemment émergé des séquelles particulièrement néfastes d’un divorce où il a dû se résoudre à se séparer des deux seuls êtres qu’il aime, son fils et sa fille, il s’est appliqué depuis peu à refaire sa vie. Assiégé par les doutes et par la peur de la mort, il ne sait trop à quoi rime son existence qu’il considère comme un échec sur toute la ligne. C’est pourquoi il s’explique assez mal pour quelle raison il a été choisi afin de remplir un poste de directeur de musée pour lequel il a présenté sa candidature à l’instigation d’un ami. Paradoxalement, c’est davantage par désoeuvrement qu’il se jette dans son travail, non pas tant pour se donner une raison de vivre – les satisfactions professionnelles ne le touchent plus guère – que parce qu’il ne se trouve rien d’autre à faire. Son arrivée en poste, outre qu’elle bouscule quelque peu les habitudes de l’institution, n’arrive pas pour autant à aider sa recherche de vérité. Bien au contraire, ses méthodes peu orthodoxes, au sein d’un milieu conservateur, l’amènent à se buter encore et toujours à l’incompréhension et à la mesquinerie de ses contemporains. Indifférent à leurs réactions, il semble planer au-dessus de son univers, intouchable et inaccessible aux sentiments humains les plus élémentaires. Sa décision de préparer une nouvelle exposition précolombienne ne fait qu’attiser les rancoeurs existant chez ses subordonnés à son endroit, et les rivalités qui les opposent les uns aux autres. Un matin, le gardien découvre dans la grande salle un des responsables du musée le coeur transpercé par un splendide couteau, un artefact indispensable des cérémonies sacrificielles aztèques. L’enquête policière bouleverse l’existence du musée alors que, malgré ses innombrables interventions, elle est incapable, dans un premier temps, de découvrir le coupable. Les tensions entre les membres du personnel sont exacerbées par la suspicion qui fait de chacun d’entre eux un suspect potentiel, aussi bien les hommes que les femmes. En outre, le gouvernement mexicain proteste avec véhémence contre le fait qu’un de ses plus précieux artefacts soit retenu comme pièce à conviction dans le cadre d’une enquête de meurtre, et menace de traîner le musée en cour. Mais, malgré tout cela, Clarence demeure imperturbable, en apparence tout au moins. Aussi peu concerné que jamais par le tour inattendu qu’ont pris les circonstances, il semble indifférent à ce qui l’entoure. Or, rien n’est plus faux, car sa vie se trouve effectivement chambardée par toute l’affaire lorsqu’il fait la connaissance de l’enquêteur qui mène le dossier, Margot, une séduisante quadragénaire.
– Jacques Septe – 316 p. – 1989 – À la fois romanesque et romantique, cette oeuvre ne laisse rien au hasard. Pas le moindre détail qui ne soit chargé de sens. En effet, ni l’arme du crime ni les réactions de l’enquêteur ne sont laissées au hasard par un auteur au sommet de son art.
jeudi 23 décembre 2021
mercredi 22 décembre 2021
Eux au miroir
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Il est de notoriété publique que la Russie – et avant elle l’URSS – est une nation menaçante. J’en veux pour preuve sa dernière tentative afin de déstabiliser la situation en Europe orientale.
En effet, Moscou a présenté à Washington un projet de traité où elle propose de neutraliser les territoires sous leur influence afin de prévenir toute attaque aux dépens de l’autre, de limiter le déploiement de missiles et, surtout, de résoudre les différends exclusivement par la voie diplomatique.
En d’autres termes, les Russes entendent déclarer la paix aux Stazunis. Il n’en faut pas plus pour démontrer une bonne fois pour toutes leur caractère résolument agressif, n’est-ce pas?
Il ne vous est jamais venu à l’esprit que, peut-être, nous ne sommes pas du côté des «bons»? Je ne prétends pas que Russes, Chinois ou autres sont au-dessus de toute critique. Non, bien entendu. Mais il semble qu’ils ne soient pas les seuls «gros méchants» et que tous les reproches qui leur sont adressés puissent très bien s’appliquer à nous également.
Finalement, on ne peut dissiper l’impression qu’en les regardant, c’est comme fixer un miroir.
Catalogue
Le contrebandier de contraventions
Roger est un itinérant dont l’occupation principale, semble-t-il, consiste à retirer des pare-brise des voitures stationnées en infraction les contraventions que les préposés y ont laissées. Si, au début, la chose pouvait paraître cocasse et relativement anodine, le procédé finit par excéder les automobilistes qui n’apprennent qu’avec un long retard qu’ils doivent des sommes parfois importantes à la municipalité. Aussi la police commence-t-elle à subir des pressions pour faire échec aux activités de Roger, surtout à partir du moment où un ami du maire finit par être la victime du clochard. L’inspecteur Yourcenar, la bête noire du service, se voit confier l’enquête que personne d’autre ne veut mener. En effet, le seul moyen d’approcher Roger et de le prendre sur le fait est évidemment de gagner sa confiance et de partager sa vie. C’est donc avec une mauvaise grâce mal dissimulée que Yourcenar entreprend son enquête. Ses premiers contacts avec le monde de l’itinérance ne se font pas sans heurts. Cependant, il découvre sous la surface de la pauvreté et de l’apparente déchéance une certaine fierté et même une joie de vivre qu’il n’aurait jamais soupçonnée auparavant. Il est pris en charge par un groupe de mendiants qui lui apprennent les rudiments de la survie dans la rue ; les bons trucs pour mendier ; où trouver de la nourriture gratuite ; comment s’assurer un minimum de confort matériel quand on doit transporter sa maison sur son dos. Élève doué, Yourcenar se prend au jeu, dédaignant parfois de rentrer coucher chez lui. Il finit par rencontrer le fameux Roger qui, d’ailleurs, ne fait aucun mystère de ses activités, annonçant même à qui veut l’entendre le fruit de ses récoltes quotidiennes. Prudemment, Yourcenar se lie d’amitié avec Roger, mais il n’arrive pas à comprendre pourquoi Roger agit ainsi. Intrigué, Yourcenar ne quitte plus son homme d’une semelle, négligeant de faire rapport à ses supérieurs, accompagnant même le clochard dans ses rondes pour se procurer ses précieuses contraventions. Lorsqu’il est reconnu par un policier alors qu’il s’enfuit avec des contraventions en poche, il est immédiatement convoqué par le commissariat. Accusé de négligence et de vol de documents officiels, ces dernières frasques, ajoutées à un dossier déjà assez bien garni, motivent son renvoi de la police. Rejeté par les siens, en particulier sa femme, il se retrouve du jour au lendemain sans un sou et à la rue. Qu’à cela ne tienne, il retourne chez ses nouveaux amis et leur raconte candidement son histoire. Même Roger s’amuse de la mésaventure et pardonne à Yourcenar ses agissements à son égard. Ce dernier, tout de même décontenancé, est pris sous l’aile de Roger qui l’emmène dans une cabane qu’il s’est construite dans un petit bois abandonné, une cabane aux murs tapissés de contraventions.
– Ralph Faure – 218 p. – 1996 – La légende veut que l’auteur, afin de se « documenter », ait lui-même suivi le chemin de son héros et qu’il soit passé lui aussi à l’école de la rue et de la mendicité. Vérité ou mensonge, le résultat est plus que réussi.
mardi 21 décembre 2021
Le sans-génie
Le 24 décembre, on doit tenir des élections présidentielles en Libye, cette grande démocratie africaine dont la stabilité a été garantie par l’intervention étrangère, il y a quelques années.
L’un des candidats à ce scrutin n’est autre qu’Abdelhamid Dbeibah, l’actuel premier ministre, qui voudrait bien faire quelque chose de valable de sa vie. Officiellement, Abdelhamid, en plus d’être un candidat à la probité indiscutable, bien entendu, affirme avoir décroché une maîtrise – un «master», comme disent les Français – en génie civil à l’Université de Toronto.
Déjà, combiner «génie» et Toronto étonne, mais la surprise ne s’arrête pas là. En effet, il n’existe aucune indication dans les archives de l’université attestant qu’un Abdelhamid Dbeibah ait jamais gradué de l’institution. Pas en génie, en tout cas.
Peut-être êtes-vous en train de vous récrier devant une telle imposture. Il ne faut pas! En effet, les trois principaux candidats à l’élection traînent tous des casseroles – comme disent les Français – et, quoique cela a entraîné des remous dans l’opinion publique, l’ensemble du corps électoral s’en accommode fort bien.
De toute façon, quel que soit le vainqueur, selon les experts, il semble d’ores et déjà acquis que les hostilités vont à nouveau déchirer le pays au lendemain d’une élection dont les résultats seront certainement contestés.
Bref, le sans-génie n’est pas seul.
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lundi 20 décembre 2021
Os, ô beaucoup!
Nouvelle crise en développement à l’horizon de l’économie mondiale: l’inflation. Vous savez, cette terrible situation qui, au cours des années 1970, a donné tellement de maux de tête aux économistes et aux capitaines d’industrie, lesquels en sont bien souvent également les chevaliers.
L’inflation est la hausse constante des prix. On sait que ces derniers augmentent toujours; il n’y a qu’à regarder le panier d’épicerie. Mais lorsque cette hausse est trop rapide ou trop accentuée (par exemple 5 % et plus), il appert que cela pose un problème majeur. Remarquez, si l’inflation ne touchait que les prix à la consommation, les experts s’en plaindraient probablement moins.
Mais là où le bât va blesser douloureusement, c’est dans les moyens qui seront déployés afin de la combattre. Première mesure facile: la hausse des taux d’intérêt, ce qui a pour effet de ralentir la circulation du capital et, ainsi, prévenir la surchauffe de l’activité économique. Deuxième mesure facile: le gel des salaires, car les salaires sont les seuls frais de production qui peuvent être comprimés, dixit Le Capital de Marx qui n’a pas toujours tort, tant s’en faut.
Bref, si vous êtes un travailleur et que vous avez des dettes, comme une hypothèque ou des emprunts à rembourser, vous allez écoper des deux manières: il vous en coûtera plus cher pour vivre à cause des taux d’intérêt augmentés et vous gagnerez relativement moins d’argent, lorsqu’on aura fixé les salaires.
En d’autres termes, vous l’aurez dans l’os en tombant dessus.
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Conster nation
Peter « Pater » Conster est un évangéliste au passé plutôt trouble, dont on se sait pas grand-chose, sinon qu’il s’applique à le voiler le plus possible. Officiellement, selon les préceptes de sa communauté d’intégristes chrétiens, il est originaire d’une famille pauvre de l’Alabama. Au début des années 1970, alors qu’il n’arrive pas à gagner sa vie, il « monte » dans la capitale de l’État. C’est là qu’il est confronté à la misère, tant matérielle que morale, de ses concitoyens et qu’il reçoit l’appel du Seigneur. Il se lie alors aux groupes évangéliques et, au grand scandale des conservateurs, il est le premier à faire la promotion active de l’égalité entre Noirs et Blancs au sein de ces groupes. Littéralement ostracisé, il décide, sans pour autant avoir été ordonné, de fonder la communauté évangélique de Little Rock. Ses talents manifestes d’orateur le rendent rapidement populaire et les foules se pressent pour l’entendre. Cet engouement ne fait que croître lorsque la rumeur lui attribue des miracles, ou à tout le moins des guérisons spectaculaires. Son prestige personnel devient alors si grand qu’il éclipse en partie le message biblique. Cependant, dans les coulisses, le révérend Conster ne mène peut-être pas une vie en plein accord avec son enseignement, mais ses critiques sont impitoyablement étouffés, au propre s’il faut en croire des rumeurs qui courent. Mais sa renommée, qui a franchi les frontières, ne se dément pas. Graduellement, son message évangélique se radicalise. Il commence à prôner une sorte de retour à la terre pour l’ensemble de la population, assorti d’une structure politique résolument théocratique. Devenue une force politique incontournable de l’échiquier états-unien, la « Conster nation » n’hésite plus à réclamer le nettoyage des moeurs politiques du pays en appelant ouvertement à l’assassinat. Lorsque certains exaltés décident de passer à l’action, le révérend Conster met le gouvernement au défi de venir l’arrêter dans sa forteresse de Little Rock. Alors que les instances judiciaires font traîner le dossier, Peter « Pater » Conster meurt, officiellement d’une embolie, quoiqu’aucun médecin extérieur à la « Nation » n’ait pu voir son dossier et encore moins examiner la dépouille. Des funérailles grandioses lui sont préparées, qui culminent en une vigile impliquant des millions de fidèles partout aux États-Unis. Le gouvernement américain ne sait comment réagir devant une telle manifestation, surtout à partir du moment où la rumeur veut que le révérend soit ressuscité, tandis que les fidèles ne demandent qu’à croire en cette résurrection considérée comme l’ultime miracle d’un saint homme.
– Ann Hanna – Première publication : 1993 sous le titre Conster Nation – Traduit de l’anglais par Annie Tanz – 334 p. – 1998 – Percutant politique-fiction à saveur religieuse, ce roman a connu une ferveur assez étonnante alors que des groupes religieux se sont formés spontanément en Alaska pour suivre les préceptes du révérend Conster !