samedi 3 décembre 2022

Morceaux de robot

 


1 000 000 000 000 000 000 $

 

L'article ici



Figurez-vous que, maintenant que – s'il faut en croire nos honnêtes médias – l'Ukraine est en train de gagner la guerre, son président commence déjà à présenter la facture. Et elle est salée.


Selon Volodymyr Zelensky, afin de «reconstruire» l'Ukraine, il en coûtera un trillion de dollars. Est-il besoin de préciser ce que cela représente? Un trillion, c'est un million de millions de millions. Bref, ça fait beaucoup de millions de dollars. Pas snob pour deux sous – sans jeu de mots –, Volodymyr est tout disposé à accepter des euros et des livres sterling à la place des dollars.


En échange, il offre de placer des régions entières de son pays, dont il est si fier par ailleurs de défendre l'indépendance, sous la commandite de gouvernements ou de grandes sociétés. Autrement dit, il accepte de vendre son pays à la pièce; le stade suprême du néo-libéralisme, quoi.


Et tout ça dans quel but? Afin que l'Ukraine redevienne comme avant, c'est-à-dire l'État le plus corrompu de l'Europe et le principal nid de néonazis.


On peut trouver ça cher. Mais c'est tellement difficile d'avoir de bons larbins, de nos jours.




vendredi 2 décembre 2022

Les libertés de la répression

 


Catalogue

 


Le verre des gris


Pièce de théâtre primée en 1987 au festival de Sopòt. Dans un bar, prétendument au centre-ville d’une métropole nord-américaine, commence à se masser la foule des habitués de la fermeture des bureaux. À part quelques prostituées dont la présence ne sert que de toile de fond, tous les clients accoudés au bar sont des hommes. En outre, ces derniers, sans exception, portent un complet gris à peu près de la même coupe, ainsi que les inévitables mallettes ne servant jamais qu’à traîner le casse-croûte que leur a préparé leur femme. Le premier acte voit s’installer une atmosphère morne alors que, avec des sons feutrés, les protagonistes échangent entre eux sous l’oeil blasé d’un barman effacé et silencieux. Ils radotent, avec la morne indifférence de l’habitude, les mêmes platitudes entre eux, avec quelques variantes, et qui charrient le discours empesé de la langue de bois triomphaliste et individualiste des années 1980. Cette avalanche de clichés finit par créer une ambiance à la fois surréaliste et absurde. Alors que les buveurs se taisent les uns après les autres, à court de phrases toutes faites et d’imagination, le silence s’installe progressivement. C’est alors, juste comme le premier acte prend fin, que fait irruption dans l’estaminet un inconnu simplement vêtu d’un t-shirt et d’un jean, et qui retient immanquablement l’attention générale. Le second acte s’ébauche à l’inverse du premier, alors que l’inconnu, dont le nom ne sera jamais révélé, essaie avec un succès mitigé de lier conversation. Ses tentatives, si elles ne sont pas découragées, au début, achoppent très rapidement, car les sujets divergents font que les échanges sombrent rapidement dans un dialogue de sourds, surtout à partir du moment où l’inconnu se présente comme un poète et que les autres buveurs veulent lui faire dire quel est son « véritable » métier. Le troisième acte commence tandis que le bar se vide au point où il ne reste plus que trois personnages avec l’inconnu. Les hommes d’affaires éméchés laissent libre cours à leurs frustrations et révèlent peu à peu leur part de rêves brisés. Incapables de supporter la vue de celui qui a suivi les siens contre vents et marées, ils deviennent de plus en plus agressifs à son endroit, menaçant même de lui faire un mauvais sort avec un couteau. L’inconnu en est quitte pour un uppercut au visage avant que d’être vidé à coups de pied. Le barman, muet jusqu’alors, intervient pour calmer les exaltés et remettre à chacun un sachet de poudre blanche. Tandis qu’il compte sa caisse, les derniers buveurs achèvent de mettre de l’ordre à leur mise avant d’aller affronter leur épouse. Il leur adresse à chacun un « à demain » indifférent.


 – Elvira Touvan – 118 p. – 1989 – Propos issu du choc terrible entre le rêve et la réalité, cette pièce a suscité des réactions diverses à sa première. Qualifiée de Hernani moderne, elle a effectivement provoqué des rixes à Athènes et à Oslo.


mercredi 30 novembre 2022

Le Gault* gauche

 




* Le gault, ou argile de Gault (dite parfois «argile albienne»), est une formation d’argile raide de teinte gris-bleu à gris foncé, qui s'est déposée à profondeur moyenne dans des eaux marines calmes, au cours du Crétacé inférieur. [… Il] contient souvent des nodules phosphatiques en grande quantité, dont une partie est classée comme coprolithes, c’est-à-dire un excrément minéralisé, fossilisé. 

(https://fr.wikipedia.org/wiki/Argile_du_Gault)


Catalogue

 


Le soldat Nuel


Cette pièce de théâtre a été écrite dans le plus pur style de Ionesco. Cependant, l’auteur tient à se dissocier de la démarche du maître en imposant un style d’écriture hautement personnel, même si le propos, fortement teinté d’absurde, peut évoquer chez certains d’autres oeuvres théâtrales du répertoire. Il s’agit d’une pièce à trois personnages, dont un seul possède un nom, le soldat Nuel (calembour avec « solde annuel », dont l’évocation revient constamment tout au long de la pièce). En plus du soldat, l’auteur met en scène le supérieur et la fiancée. Au lever du rideau, le soldat Nuel, au garde-à-vous, semble faire rapport à son supérieur, un homme qui, autant par son habillement que par son attitude, représente la forme la plus anonyme du bureaucrate. Le premier acte se limite à cette interaction extrêmement sobre, alors que Nuel garde tout du long la même posture, et qu’un dialogue nébuleux s’installe tant les deux personnages s’ingénient à tourner autour du pot en évitant de mentionner l’objet de leurs délibérations. Pendant cette conversation, le soldat Nuel semble extrêmement réticent à obéir à un ordre « qui vient d’en haut ». Le supérieur, quant à lui, utilise tous les clichés connus, et quelques arguments bien de son cru, afin de venir à bout de l’hésitation du soldat Nuel, dont la conviction s’effrite devant ces assauts tous plus rationnels les uns que les autres. À tout propos, l’argument, qui revient comme un leitmotiv obsédant, est toujours : « Sinon, qu’adviendra-t-il du solde annuel ? » Le second acte ne met en scène que le supérieur et la fiancée, laquelle vient lui demander des comptes au sujet du peu d’empressement de son fiancé, visiblement le soldat, à lui faire une demande en mariage à bon terme. Si la jeune femme est littéralement obsédée par l’idée du mariage, ses motivations sont tout sauf sentimentales. Elle passe en revue avec le supérieur les avantages économiques, fiscaux et budgétaires en ramenant elle aussi constamment sur le tapis la question du solde annuel. Devant le manque de conviction du soldat Nuel, le supérieur, « pour les besoins de la cause », décide froidement de tomber amoureux de la jeune femme. Le chassé-croisé auquel est consacré le troisième acte ne sert qu’à tenter de susciter la jalousie du soldat, mais en vain semble-t-il, jusqu’à ce que le supérieur et la fiancée décident de laisser croire à Nuel que la jeune femme a hérité d’une forte somme. La tentative ayant réussi, le soldat et sa fiancée sont mariés par le supérieur qui, en guise d’union, leur fait signer un contrat. L’épilogue de la pièce met en scène le soldat et son épouse qui se présentent au supérieur afin de lui vendre leur enfant qu’ils transportent dans un coffre à outils.


 – Héléne Nisay – 122 p. – 1990 – Pièce dure et froide sur l’omnipotence de l’argent et de son pouvoir dans les sociétés contemporaines où toute considération est ramenée essentiellement aux sempiternels « profits et pertes ».


mardi 29 novembre 2022

Colère, emblème et couleurs

 





Une nouvelle controverse secoue le championnat de football de la Coupe du monde, ce qui en fait l'édition la plus politisée de l'histoire de l'événement.


Brièvement, tout a commencé lorsque les Stazunis ont voulu poser un geste de solidarité envers les femmes iraniennes qui ont ouvert une large contestation du régime au sujet du port du hijab. Comme d'habitude, les Yankees se montrent très forts pour agir de manière symbolique qui ne change rien – sinon pour foutre la merde – et – surtout – qui ne leur coûte rien.


Ainsi, la fédération US de foot a intentionnellement mis en ligne sur sa page un drapeau iranien qui ne comporte que les trois bandes verte, blanche et rouge, sans l'emblème central qui est  une forme hautement stylisée du mot «Allah».


Dès lors, furieux, le gouvernement iranien a exigé rien de moins que l'expulsion de l'équipe yankee de la compétition.


Comme les formations de ces deux pays vont s'affronter aujourd'hui, j'espère que l'arbitre aura fait provision de cartons de toutes les couleurs.





https://fr.wikipedia.org/wiki/Drapeau_des_Patriotes



lundi 28 novembre 2022

La belle affaire




On se demande un peu ce qui a bien pu traîner aussi longtemps. En effet, compte tenu de l'attitude générale de l'Occident à son égard, on eût pu croire que la décision aurait dû être prise bien avant.


Enfin, ne soyons pas un esprit chagrin et accueillons l'initiative avec tout le respect qu'on lui doit. En effet, le Parlement européen, brièvement tiré de sa torpeur coutumière, a décidé de placer la Russie sur la liste des États soutenant le terrorisme. Pourquoi? Parce qu'elle a envahi un autre pays; et ça, c'est pas beau du tout.


Notons au passage que, historiquement, les membres les plus éminents dudit Parlement – Royaume-Uni, France et Allemagne en tête – en connaissent un bout sur la question de l'invasion de pays, aussi il n'est pas permis de douter de leur expertise dans ce domaine.


Fort heureusement pour les Stazunis, il n'existe pas de Parlement africain, ni asiatique, ni levantin, ni latino-américain.


Ils l'ont échappé belle, dans c't'affaire.


Catalogue

 


Les six gares


Dans la Russie du XIXe siècle, un vieil homme est assis dans un compartiment de train attendant que celui-ci veuille bien démarrer. Il s’agit du vieux Pavel qui part pour l’hospice au lendemain de la mort de sa femme. Abandonné par ses enfants, il s’est rendu à son corps défendant à une pratique que nombre de rentiers de condition modeste utilisent alors. Sur les conseils de son avocat, il a vendu tout ce qu’il possède, y compris sa datcha chérie de Kountsevo, véritable métaphore du paradis, afin d’acheter une chambre dans un hospice de Tula. Sans trop penser au fait qu’il s’en va habiter la chambre d’un mort, Pavel s’est résolu, avec un fatalisme typiquement slave, à cette ultime odyssée. C’est donc avec ses deux malles, bourrées des souvenirs d’une vie consacrée au travail et à sa famille, et de ses quelques valises qui, elles, contiennent ses effets personnels, que Pavel a pris place dans le train. Au départ de Moscou, six arrêts le séparent de Tula, six gares qui représenteront les dernières choses du monde extérieur que Pavel ne verra jamais. C’est donc avec une attention soutenue qu’il ausculte les tableaux que lui présentent ces gares et qu’il en discute avec les gens qui viennent, au hasard des arrêts, prendre place dans son compartiment. La pièce est divisée en sept tableaux. Le premier offre la méditation de Pavel sur ce qui a été sa vie jusqu’alors. Les tableaux subséquents symbolisent les six âges de l’homme, depuis l’enfance jusqu’à la vieillesse. À chacun de ces tableaux, un représentant des âges de l’homme monte dans le compartiment, seul ou accompagné, et lie conversation avec Pavel dont le rôle ne consiste plus tant à prodiguer conseil, comme le veut la coutume, mais plutôt à écouter et à réapprendre les joies de l’existence. Ainsi, la mère d’un jeune enfant lui raconte les malheurs du petit dans une école tandis que le chérubin dort la tête appuyée sur sa cuisse. De jeunes carabins viennent se cacher dans le compartiment ensuite, afin de fuir le contrôleur, car ils n’ont pas de quoi payer leur voyage. Un jeune homme portant un bouquet vient lui parler de sa fiancée qu’il s’en va rejoindre. Un officier de l’armée revenant d’une campagne difficile lui confie les avanies que ses supérieurs et son mariage lui font subir, à tel point qu’il en vient à regretter de rentrer chez lui. Un couple à la santé chancelante tient avec lui une conversation en canon. Finalement, une femme d’âge indéfinissable revenant d’un enterrement lui confie les troubles que la perspective de la mort a mis dans son âme. À la dernière gare, Pavel fait descendre ses malles par un porteur et attend patiemment le départ du train qui l’emmènera loin de Tula.


 – Bourge Poustouri – 116 p. – 1988 – Pièce de théâtre contemporaine respectant presque à la lettre le style de Tchékov, et représentant en ce sens une magnifique analyse littéraire. Cependant, c’est bien davantage pour sa portée humaniste que cette pièce a été montée au Festival du théâtre des Amériques pour représenter la Roumanie, pays d’origine de l’auteur.

dimanche 27 novembre 2022

Face lisse et police