À moins d’être un spécialiste de l’incurie chez autrui, vous n’avez peut-être pas remarqué que le gouvernement provincial, sous l’égide du très éclairé Philippe Couillard (le nom est marrant), a été remanié. Le premier ministre a donc décidé de rétrograder quelques petits incompétents et a tiré de l’anonymat quelques autres.
Une déception, tout de même, les gros incompétents, eux, sont restés à l’avant-scène; dans bien des cas, à leurs portefeuilles habituels. À cause de cela, l’opposition – on s’y attendait – a déploré un total manque de vision de la part du gouvernement. Ce qui a été un peu plus étonnant, c’est lorsque les médias dans leur ensemble ont exécuté un tir groupé en affirmant la même chose.
Il n’en fallait pas davantage pour piquer au vif l’excellent premier ministre que la bienveillante providence a condescendu à nous jeter dans les pattes. Drapé dans cette indignation légendaire dont il aime se couvrir – la barbe au-dessus, comme il se doit – aux grands moments de sa carrière politique, il a commis cette déclaration que l’on ne peut que reproduire dans sa totalité: «Qu'est-ce que vous voulez avoir, vous les médias? Vous voulez avoir une livre de chair, un peu de sang sur la table? C'est ça qui vous intéresse? Vous voulez avoir des drames humains? C'est ça qui vous excite un peu? Vous voulez avoir des beaux articles là-dessus?»
Du sang sur la table? Quel tragédien, ce cher Philippe, tout de même. Remplacer l’une ou l’autre de ces incompétentes sangsues qui handicapent l’administration du Québec sous sa gouverne ne s’apparente pas à une exécution physique, tant s’en faut. Et ça ne serait certainement pas un drame non plus, bien au contraire.
D’ailleurs, ce n’est pas du sang que l’on veut voir sur la table.
C’est la table que l’on ne veut plus voir du tout!