On les appelle des «conflits gelés». Ce sont ces foyers de guerre qui, à l’instar des volcans, s’éveillent de temps en temps, juste ce qu’il faut pour déverser, non un torrent de lave, mais un flot de sang. Puis, suivant en cela les pratiques médicales d’autrefois, le patient, un instant soulagé par la saignée, peut attendre calmement la prochaine crise.
C’est ce qui se passe actuellement entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan à propos du Haut-Karabakh. Tout comme les Balkans, de l’autre côté de la mer Noire, le Caucase a été le théâtre de notables brassages de populations au fil des marches triomphales de divers empires dans la région, et ce, aux dépens des ethnies locales, évidemment.
Ainsi s’est-il créé une forte minorité arménienne dans le Haut-Karabakh, au milieu d’une population azérie. Il y eut ensuite des tiraillements à ce sujet jusqu’en 1921, quand le camarade Staline a décidé que le Haut-Karabakh serait rattaché à la république soviétique de l’Azerbaïdjan.
À la chute de l’Union soviétique, la situation, échappant désormais à tout contrôle, s’est rapidement envenimée et, dès 1991, une guerre a éclaté à la suite de laquelle le Haut-Karabakh a été conquis par l’Arménie, en même temps qu’une partie du territoire azerbaïdjanais.
Depuis, des résolutions de l’ONU ont condamné cette occupation illégale. Aujourd’hui, l’Azerbaïdjan, qui a remis sur les rails à la fois son économie et son armée, entend profiter de la faiblesse arménienne afin de libérer les régions qui lui ont été prises.
Évidemment, si elle échoue, on ne fait que remettre à plus tard la reconquête. Si elle réussit, on ne fait que remettre à plus tard la revanche.
Bref, la pérennité de ces conflits leur a donné l’étiquette de «gelés». On ne pouvait s’attendre à rien d’autre des résidus de la guerre froide.