samedi 6 août 2022

L'Ukraine est en sainte




C'est pratiquement passé comme une lettre à la poste. En d'autres termes, ça s'est quelque peu perdu dans le fatras de nouvelles. Mais Amnistie internationale, l'organisation non gouvernementale (ONG) bien connue, a publié un rapport, cette semaine. Dans ledit rapport, elle reprochait à l'armée ukrainienne de mettre en danger la vie de civils.


Il n'en fallait pas plus pour que se déclenche un tollé à Kiev, dénonçant le rapport et accusant l'ONG de faire le jeu de Moscou. Personne n'a pris la peine de demander si les faits rapportés quant à la sécurité des civils étaient véridiques ou pas, l'important étant de nier, comme le veut tout bon processus de propagande.


Les conséquences ne se sont pas fait attendre. La responsable d'Amnistie internationale en Ukraine a démissionné à la suite de la publication du rapport. Il faut la comprendre, aussi: désormais l'Ukraine et la Russie allaient comparaître sur un pied d'égalité au tribunal de l'histoire. C'est embêtant pour quiconque cherche à lui gagner son auréole de sainteté.


Mais que le gouvernement de Kiev ne s'inquiète pas trop. Avec le temps, Amnistie internationale finit toujours par se lasser. Ainsi, depuis combien de mois ne fait-elle plus de remontrances à Israël? Eh bin, ce sera pareil pour l'Ukraine.


vendredi 5 août 2022

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Cette époque-ci colle !


Essai apologétique sur le retour en force du libéralisme auquel les conditions actuelles méritent le terme de « nouveau », ne serait-ce qu’à cause de la nature changeante des défis qui l’attendent dans les années à venir. L’ouvrage est divisé en deux parties principales. La première explique en détail quelles sont les conditions qui ont forcé le libéralisme à s’adapter afin de répondre aux besoins de l’économie de l’après-guerre froide. Ainsi, l’auteur révise, non sans une bonne dose d’esprit critique, la nouvelle donne mondiale, en particulier les grandes lignes du libre-échangisme et du libéralisme économique en fonction de la mondialisation des marchés et de l’abaissement des barrières douanières, en particulier depuis la chute du mur de Berlin, qui fait figure de symbole. Utilisant comme modèle de référence le phénomène analogue qui, de la fin du XIXe siècle jusqu’à la Première Guerre mondiale a caractérisé l’Occident, il remet les pendules à l’heure. Selon lui, la disparition des marchés coloniaux, tout en forçant les économies à s’ajuster dans un contexte encore plus concurrentiel, élimine un important brandon de discorde que l’auteur rend seul responsable de l’éclatement du modus vivendi occidental du tournant du siècle, qui a mené directement à la guerre. Dans un deuxième temps, l’auteur fait ressortir les « colles », comme il nomme les défis que la nouvelle économie et le néolibéralisme en tant que modèle économique devront relever dans les décennies à venir. Il faudra alors en arriver à une stabilité où la prospérité commune pourra être assurée non seulement en Occident, mais également sur tous les continents où la survivance des régimes de gauche – en particulier en Chine, en Corée du Nord et au Vietnam – présentent les principaux obstacles à l’essor universel. Les « colles » qui se présentent donc à l’orée du prochain siècle sont, par ordre d’importance : la disparition définitive du néocolonialisme, jugé plus bénin que son prédécesseur ; la concentration de la richesse collective en un nombre de plus en plus restreint de mains ; mobilité accrue du capital grâce aux nouvelles technologies de communications et son corollaire, la mutation en de nouvelles formes du capital-argent ; plafonnement de l’emploi qui, bien que mal nécessaire, comporte tout de même quelques légers inconvénients à l’éclosion du néolibéralisme. En dépit de ces rares bémols, l’auteur demeure optimiste quant aux décennies à venir et s’en remet avec confiance à la capacité d’adaptation de ce système économique qui, bien que toujours menacé de toutes parts par la social-démocratie, reste le meilleur qui soit, tant dans une perspective strictement économique que dans celle de la politique, qu’elle soit nationale ou globale.


 – Guillaume Röhn – 212 p. – 1996 – Évitant avec justesse les pièges des formules toutes faites dont les soi-disant experts se gargarisent, l’auteur élabore un vocabulaire de circonstance afin de mieux cerner les concepts qui, dans les médias, se recouvrent trop souvent. Analyste de grand style, il nous offre un essai à la limite du journalisme d’enquête.


mercredi 3 août 2022

La turbine qui turbine... pas


 

Nancy bêle aussi

 


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Ce pût été un péché


Philologue et linguiste de renommée internationale, Guillaume Röhn a consacré sa vie à l’étude des textes sacrés judéo-chrétiens. Érudit et polémiste, son champ d’intervention a depuis longtemps débordé le cadre universitaire. Il y a quelques années, ses travaux se sont déplacés du domaine de l’écrit à celui de la philosophie alors qu’il mène avec humour et compassion une recherche sur la morale contemporaine. S’inspirant de son domaine de prédilection, il nous donne aujourd’hui un essai où il met en parallèle les fautes de grammaire et les fautes de comportement. Ses conclusions troublantes révèlent que, au Québec tout au moins, plus ça change et plus c’est pareil. Le monde de l’écrit est régi par des règles strictes qui, en principe, ne sont jamais volontairement transgressées. Par contre, comme tout ensemble de règles, le commun des mortels n’assimile des principes grammaticaux que la fraction qui lui permet d’employer la langue écrite de manière strictement fonctionnelle. Dans ce domaine, des experts, grammairiens, linguistes ou autres se chargent, lorsque la chose est nécessaire, de corriger les erreurs, les « fautes », et de rendre aux textes une pureté académique. Il en va de même de la morale et des comportements sociaux. À cet effet, l’auteur prend exemple sur les deux volets de la société québécoise du vingtième siècle : le volet traditionnel et le volet laïque. Le volet traditionnel, tout entier imbibé de dogme religieux était en fait gouverné par la notion de péché. Essentiellement, ce qui n’était pas péché – un nombre étonnamment restreint de comportements – constituait la norme acceptable. Or, comme la morale chrétienne pouvait essentiellement trouver à redire à presque tout, cela donnait, en plus des autres pouvoirs (moral, politique, économique, etc.) de l’Église, le pouvoir d’absolution. Sans doute, selon Röhn, le plus important de tous. Le pouvoir d’absolution reposait évidemment sur le processus de pénitence qui « nettoyait l’âme de la tache du péché ». Le changement de société qui transforme le Québec à l’aube des années 1960 entraîne des bouleversements de valeurs qui culminent avec l’arrivée de l’ultracorrection au cours des années 1980. Si la notion de péché est alors plus que jamais raillée comme un concept suranné, il s’installe dans le paysage moral de la société une batterie de normes comportementales tout aussi astreignantes que celles qui existaient avant 1960. Cependant, tandis que la notion d’absolution était pratiquement acquise dans la conception traditionnelle de la société, cette notion est conditionnelle et aléatoire aujourd’hui. 


 – Guillaume Röhn – 556 p. – 1988 – Étrange voyage à travers un réseau de réalités en apparence déconnectées et pourtant convergentes. Morale et grammaire, faute et absolution, correction et ultracorrection ne sont plus que des facettes du même tout.


mardi 2 août 2022

Ontariens demandés

 


Franco phony

 


lundi 1 août 2022

La stratégie du boomerang

 

L'article ici



On sait que le gouvernement ukrainien exige encore plus de sanctions aux dépens de la Russie. Il n'est pas le seul, car quantité d'acteurs – sans jeu de mots – politiques occidentaux réclament la même chose à cor et à cri.


Or, on constate que, depuis l'imposition de sanctions économiques devant punir Moscou d'avoir envahi l'Ukraine, la situation économique russe ne s'est pas du tout détériorée. Certes, il y eut sur les places financières, au début, un effondrement de la valeur du rouble et les partenaires commerciaux européens ont mis un terme à la plupart de leurs échanges avec la Russie.


L'ennui, c'est que, depuis, le rouble a repris de la vigueur, au point où il atteint un taux de change supérieur à ce qu'il était il y a deux ans, tandis que l'euro est tombé à sa valeur la plus faible depuis 2002. Les prix se sont envolés en Europe, en particulier ceux des sources d'énergie, alors que les échanges commerciaux ont légèrement augmenté côté russe.


En prime, quatre gouvernements sont tombés en Europe: au Royaume-Uni, en Bulgarie, en Italie et en Estonie. Si les causes de cette déstabilisation sont sans doute multiples, il est certain que les sanctions destinées à affaiblir la Russie ont eu pour effet premier d'affaiblir les Européens. 


L'important, c'est que ça arrange les Yankees...




Refus, j'ai

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Boulot noir


Nulle transformation socio-économique en Occident ne s’est plus clairement affirmée que le passage vers l’économie tertiaire. Au Québec en particulier, les mutations économiques se sont opérées à un rythme accéléré, étant donné son industrialisation relativement tardive par rapport au reste du continent nord-américain. Faut-il trouver là l’explication du phénomène que l’auteure a baptisé le « boulot noir » ? Quoi qu’il en soit, le rapport de l’employé québécois par rapport à son travail a pris une tournure particulièrement dysfonctionnelle dans le contexte actuel, et menace d’effriter non seulement la confiance que le travailleur entretien vis-à-vis son gagne-pain, mais également envers son avenir. Le travailleur québécois est donc en majorité, à cause de l’évolution de l’économie vers le secteur tertiaire, un col blanc. Or, de plus en plus, et en particulier dans les administrations privées, le travailleur est appelé à dépasser les exigences du poste qu’il occupe. Il ne suffit plus – et de loin – de faire son travail. Il ne suffit pas davantage de le faire bien et consciencieusement, comme le voulaient les anciens slogans appelant tout un chacun à l’excellence. Désormais, le travailleur, qu’il soit simple employé ou cadre, se doit d’aimer son travail. En effet, on constate que le tableau du boulot se noircit sans cesse d’exigences de plus en plus nombreuses, et de plus en plus irréalisables. Étant donné que la société a fait du travail l’une des marques de statut social, ce dernier se permet désormais d’exiger du travailleur un attachement omnipotent et sans faille, toujours plus astreignant. Or, cet amour inconditionnel de son travail, que d’aucuns ont affublé, à tort, du nom de « professionnalisme » devient progressivement dans les organisations modernes la finalité absolue. En quelque sorte, l’amour du travail transcende la finalité de la tâche. Les statistiques en Occident sont révélatrices là-dessus ; à mesure que les indices de professionnalisme et de l’atteinte de l’excellence augmentent, la productivité baisse en proportion. En définitive, l’amour du travail rend son accomplissement accessoire ! Il faut donc démontrer clairement et sans ambages l’amour que l’on éprouve envers son travail. Seul un zèle de tous les instants constitue une preuve suffisante de cet état d’esprit. Cependant, cette situation généralisée entraîne des conséquences qui présentent des dangers sur le plan psychologique. En effet, l’amour du travail, et surtout ses contraintes, exige une capitulation de l’ego individuel. 


 – Céline Irénée – 284 p. – 1993 – Professeure à l’Université du Québec, l’auteure dirige également la Chaire d’écologie du travail subventionnée par BBE inc., ICM Canada ltée, ATTT inc. et MKDO. Cet essai est le premier qu’elle publie et il s’avère un brillant succès de librairie.

dimanche 31 juillet 2022

Zèle en skis

 



Dernièrement, Volodymyr Zelensky, qui combat inlassablement l'envahisseur russe, a tout de même trouvé le temps afin de poser pour la revue de mode Vogue, sans doute un allié de poids dans la lutte de l'Ukraine pour son indépendance. À l'évidence, après la comédie et la politique, le voici qui se lance dans le mannequinat. Visiblement, il est sur une pente glissante.


Mais que ses partisans se rassurent, il avait gardé son t-shirt crade, était toujours mal rasé et conservait son air de chien battu. Quant à ce dernier point, on se demande pourquoi, car, à en croire la propagande de Kiev, ses forces militaires jugulent assaut après assaut et même montent des contre-attaques dévastatrices. À tel point que les autorités viennent d'annoncer que l'armée ukrainienne va maintenant évacuer l'est du pays dans le cadre d'un repli victorieux sur une large part du front.


Si ça continue, l'armée russe n'aura plus qu'à capituler une fois qu'elle aura conquis la capitale ukrainienne.