vendredi 13 mai 2022

Catalogue

 


On dépose le pape


Au début de la Première Guerre mondiale, un des porteurs de la litière, quoique réformé à la demande du Saint-Siège comme tous ceux qui, au Vatican, remplissent une charge pour le pape, décide d’aller faire son service militaire. Aussi faut-il lui trouver un remplaçant. Un jeune prêtre romain, d’une moralité exemplaire, est choisi par les autorités compétentes. Après une formation rapide, du fait de l’urgence de la situation, il apprend comment porter le pape sur ses épaules. Il devient donc le témoin privilégié de toutes les apparitions publiques et, du même coup, l’idole de sa famille que, bien qu’habitant la proche banlieue romaine, il ne voit plus guère. Or, s’il est un acteur, bien modeste il est vrai, des manifestations de compassion étalées par l’autorité du Vatican au sujet de la guerre qui ravage l’Europe, il est également témoin de choses plus troublantes. Ainsi, il apprend que le Saint-Siège soutient, quoique discrètement, la cause des Empires centraux contre les Alliés, préférant épauler l’Autriche catholique contre les protestants anglais, les orthodoxes russes et les anticléricaux français. Dans le même temps, alors que son sens politique s’affine au contact des tractations dont les antichambres du Vatican sont le théâtre, il noue des contacts assez troubles avec des membres de la Curie, eux-mêmes liés au corps de gardes suisses. Progressivement, le jeune ingénu se familiarise avec un certain milieu formé de magouilleurs et de débauchés. Reconnu pour sa discrétion absolue, il est souvent recruté afin d’escorter des hommes importants lorsqu’ils s’absentent du Vatican pour leurs « affaires » personnelles. Apprécié pour sa jeunesse et sa beauté, le jeune prêtre est vite appelé à se joindre aux orgies auxquelles il finit par s’adonner avec un entrain et un abandon qui l’étonnent lui-même. Au matin, alors que sa conscience le taraude, il se retrouve le plus souvent sous la litière papale et, que ce soit réalité ou illusion, il sent à chaque fois l’absolution et la grâce du souverain descendre sur lui comme entraînées par la gravité. Sa conscience apaisée, il peut alors reprendre le train des fêtes, tandis que, le jour, sa dévotion, pourtant sincère, parvient encore à toucher son entourage. Alors que l’Italie entre en guerre aux côtés des Alliés, les appuis papaux envers les Centraux doivent se faire encore plus discrets, aussi des missions sécrètes sont-elles dépêchées depuis Rome vers Vienne. Souvent requis pour « organiser » ces missions, le jeune homme ne manque jamais de fournir le personnel féminin nécessaire pour donner le change aux douaniers suisses. 


 – André Fusse et Esther Haszy – 698 p. – 1998 – Délaissant le style qui a fait la renommée de ces deux auteurs, ils préfèrent se pencher ici vers le roman psychologique. Le résultat, certes inattendu, demeure extrêmement intéressant. Les détracteurs ont reproché à ce roman son caractère exagérément égrillard, ce qui, paradoxalement, a aidé à sa popularité.

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