vendredi 27 mai 2022

Catalogue

 


Le pessimisme pourrait aller mieux


Journal intime d’un adolescent appelé Bernard. Le roman est écrit sur le ton d’un monologue avec ses incohérences, ses moments d’espoir et de découragement. La couleur particulière de l’écriture donne une résonance troublante de vérité, à tel point qu’on s’imagine parfois lire le compte rendu d’une séance chez le psychiatre. Bernard, comme tous les jeunes de son âge, est aux prises avec les dures réalités de la vie. Ayant jusqu’alors passé une enfance sereine et somme toute assez couvée, les premiers contacts avec le monde des adultes, « l’univers des autres » comme il l’appelle, sont donc assez brutaux et amènent de douloureuses prises de conscience. Les plus dures l’obligent à se départir un à un des idéaux qu’il a chéris plus jeune, tels l’entraide et l’amour universels. Désormais laissé sans alternative afin d’interpréter le monde qui l’entoure, Bernard sombre progressivement dans une dépression paralysante, et ce, malgré l’attention toujours présente de ses parents et du reste de sa famille. Même l’apparition récurrente d’une jeune voisine de son âge dans le cercle familial ne suscite chez lui aucun intérêt. La seule personne à qui il trouve encore la force de se confier est une enseignante de son école, Nadine, plus de quinze ans son aînée. Émue par les difficultés que traverse le garçon, Nadine le prend sous son aile et tente d’abord de briser la spirale qui enfonce Bernard de plus en plus profondément dans sa dépression. Afin de marquer des points dans ce jeu dont elle n’entrevoit pas encore le danger, elle se résout à prêcher par l’exemple. D’abord en montant en épingle les gestes d’autrui qui démontrent un véritable respect des autres, elle finit par introduire Bernard dans son intimité, auprès de ses amis et même au sein de l’organisme de charité où elle travaille bénévolement. Cette proximité amène une ambiguïté de plus en plus palpable au sein de leur relation. Acculée au pied du mur par le garçon qui exige de savoir si elle l’aime vraiment, Nadine accepte de coucher avec lui. Malgré elle, l’affection envers le jeune homme, le plaisir qu’elle a éprouvé dans ses bras et le besoin de tendresse qu’elle n’avait pas comblé depuis des années l’amènent à s’attacher à lui. Mais leur relation ne dure guère. Bernard est prompt, après cette trop facile conquête, à porter son intérêt sur la jeune voisine et il délaisse rapidement Nadine sans explication, ne pouvant s’empêcher de ressentir la honte et la lâcheté qui s’emparent de lui comme un vertige particulièrement enivrant. Il s’abandonne alors à sa nouvelle relation avec assez peu d’entrain et, lorsque la jeune fille s’aperçoit qu’elle est enceinte, il l’abandonne à son tour. Ayant désormais appris comment traiter ses semblables et à laisser libre cours à son égoïsme afin d’assurer sa propre survie, le journal de Bernard se conclut sur son entrée de plain-pied dans « l’univers des autres ».


 – Charles Lathan – 304 p. – 1990 – Roman à la fois noir et désespéré, jugement implacable sur ses contemporains, cette oeuvre a placé l’auteur au premier rang des créateurs littéraires de sa génération et l’a révélé à un large public.

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