Ce doit être un membre du barreau : il est toujours en prison !
Un avocat en vue, dont l’étoile est à la hausse, est amené à plaider une cause routinière devant un tribunal de basse instance. À un moment, un échange un peu vif avec le magistrat dégénère en malentendu et l’avocat se retrouve accusé d’outrage au tribunal. Malgré ses protestations, il est emmené en cellule où il passe la nuit avant d’être transféré vers une véritable prison. Alors que son univers ne tient plus qu’aux visites que sa femme et sa famille lui font avec une réticence mal dissimulée, il fait la rencontre, dans ces lieux, de quelques-uns de ses anciens clients. Certains d’entre eux ont connu auprès d’autres plaideurs des fortunes moins enviables ; les autres purgent la peine que l’avocat n’a pu leur éviter. Anticipant à tort quelque manoeuvre afin de tirer vengeance de leur emprisonnement, l’avocat, alors que les visites des siens s’espacent insensiblement, se lie d’une certaine amitié avec ceux qu’il considérait auparavant comme des malfrats. Il apprend d’eux certains trucs afin de se ménager une vie de geôle un peu plus agréable et, s’il est témoin de certaines amours surprenantes, il n’en est pas moins renversé de constater le degré de respect dont il bénéficie. Une fois sa caution payée, il ne retourne plus à la prison, sinon pour parler avec ses clients, mais aussi pour revoir ses « amis ». Ce genre de relations, de par leur sérénité, contraste vivement avec la vie qui l’attend lorsqu’il rentre chez lui. À la maison, la distance s’est creusée entre lui et sa famille. Sa femme, d’abord, déjà très occupée par ailleurs, semble l’éviter carrément. Ses enfants, une adolescente et un jeune garçon, d’ordinaire si insolents s’enferment dans un mutisme entêté, même sous ses pires provocations. Mais c’est également le voisinage qui se défie de lui. Ses désillusions ne font que s’accroître lorsqu’il prend contact avec son avocat qui ne semble lui porter qu’un intérêt relatif, refusant même de tenir compte de ses conseils, ou même de prendre son bien-être en considération. De plus en plus irrité par les lenteurs et, surtout, les exactions, de ce qu’il considère comme une accusation inique, le caractère de l’avocat commence à changer. Il devient de plus en plus irritable et cassant envers son entourage, aussi le peu de sérénité familiale subsistant disparaît rapidement. Lorsque son procès s’ouvre enfin, il constate que son représentant n’a pas du tout tenu compte du plaidoyer qu’il lui a suggéré. En plein tribunal, l’altercation éclate entre les deux avocats. Renvoyé en prison, il constate que ses amis ont tous été libérés sur parole.
– Claire Nhu – 300 p. – 1990 – Fable élaborée sur le thème de l’arroseur arrosé, ce roman donne un autre son de cloche quant au monde feutré et hypocrite de la justice. La grande originalité de l’oeuvre tient à ce que, plutôt que de voir ce monde inquiétant du point de vue du système ou de celui de l’accusé, l’auteur a imaginé une situation permettant d’aborder la question de manière neutre et objective. La chose est parfaitement réussie, mais le système judiciaire n’y gagne pas une réputation enviable.
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