lundi 7 novembre 2022

Catalogue

 


L’enfant de Cheyenne


Dans un village imaginaire du Dakota nommé Bent Arrow, référence limpide à Wounded Knee, un groupe d’Amérindiens assiégés par l’armée américaine au début des années 1970 passe une ultime veillée d’armes. En effet, par décret présidentiel la veille, les personnes qui ont accepté de quitter le camp retranché ont bénéficié d’une amnistie générale. Cependant, l’offre était assortie d’une menace explicite : les personnes refusant de céder la place seront attaquées le lendemain à l’aube. Malgré la supériorité numérique des assiégeants, quelques irréductibles ont juré de défendre le village jusqu’à la mort. Dans un sous-sol, six de ces derniers passent une ultime soirée devant un feu de foyer. Seuls contre un monde plus menaçant que jamais, ils cherchent entre eux le courage de faire face à un destin implacable. Ils font le point sur leur identité et les menaces qui pèsent sur leur peuple. Le groupe hétéroclite comprend un adolescent, un guerrier, un vieillard, un chaman, un homme d’affaires retenu là contre son gré et une femme enceinte. Au premier rang de leurs préoccupations demeure l’instinct de survie. À leur grande surprise, l’homme d’affaires, dont ils occupent la maison, leur révèle l’existence d’une cachette dont l’usage demeure vague et mystérieux. Or, la cachette ne peut abriter confortablement qu’un seul individu, car elle est peu aérée. Aussitôt, le débat s’engage entre les six personnes afin de déterminer laquelle est la plus digne d’occuper la cachette et d’échapper ainsi aux balles et aux obus des Américains. Le propriétaire des lieux est écarté presque d’emblée à cause de sa collusion à peu près certaine avec « l’occupant ». Le guerrier fait valoir l’importance de poursuivre la lutte par la voie des armes et présente sa bravoure comme caution de sa survie. Le vieillard invoque le respect dû aux aînés et le chaman insiste sur l’importance de perpétuer les traditions dont il est le dépositaire. Le jeune homme n’a d’autre argument que celui de sa jeunesse qu’il présente comme garante de l’avenir de la race. Mais les personnes présentes trouvent cet argument plus valable dans la bouche de la femme enceinte qui promet d’élever son enfant dans le respect de la culture de son peuple. C’est à elle que revient le privilège de survivre. Afin de garantir le secret, le guerrier assassine l’homme d’affaires qui menace de la trahir. À la fin de la pièce, la jeune femme révèle qu’elle a bien survécu à l’assaut, mais que, dégoûtée par la violence et l’horreur, elle a préféré se faire avorter afin d’éviter ce supplice à son enfant.


 – Paige Webb – Première publication : 1992 sous le titre Indian Winter – Traduit de l’américain par Janine Neely – 132 p. – 1992 – Pièce au propos noir et écrasant dont l’espoir est totalement absent. Lauréate du prix de Théâtre américain attribué à l’occasion du 500e anniversaire de la traversée de Colomb.

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