Il était une fois…
Puis c’était toujours des géantes,
Puis c’était toujours des géants,
Puis ça se passait toujours
Dans un pays lointain...
Ils disaient : Il était une fois…
Ça chauffait les maisons,
Ça tenait en haleine
Les enfants puis les soirs longs.
C’était des dires,
C’était des contes,
C’était des histoires à rester debout.
Parce que le chez-nous
Il se tenait le dos drette.
Le chez-nous,
Il se tenait au bout du mât.
C’était comme un bout de voile
Taillé d’avance
Pour un bateau qui était pas là,
Mais voguait dans les espérances.
Les usages puis les jours
Côtoyaient les légendes.
Il mouillait des hommes forts,
Des Alexis grands coureurs,
Puis les jupons de la Rose
Qui faisaient danser les diables,
Les canots qui déchiraient
Les dentelles boréales.
Il était une fois…
C’était un temps de mythes.
Les chemins étaient pas longs,
Mais ça s’ouvrait sur du vaste.
Y avait des poètes au pouvoir,
Y avait des possibles à pleines clôtures.
Il était une fois…
C’était pas de la nostalgie,
C’était juste un entrebâillage
Sur des demains qui se pouvaient encore…
Il était une fois…
Il était une fois jusqu’à hier...
Il était une fois jusqu’à maintenant…
Le grand maintenant
Qui sonne à la porte du siècle fou.
Le grand maintenant qui insiste,
Les doigts plantés dans le seuil
D’une immense maison
Sans pays.
On se vote comme on se vend.
Puis les partis oublient de nous faire un tout.
L’histoire s’écrit à l’encre débile.
Advienne qui pourrira.
Jusqu’à se dire que peut-être…
Chacun de notre bord…
Peut-être que l’histoire nous a joué un tour,
Peut-être qu’il n’est plus une fois,
Peut-être qu’il n’est plus aucune fois.
Ils sont où nos hommes forts,
Les géantes, les coureurs,
Les diables, les belles danseuses?
Quand on cogne sur la bulle
L’impression que ça sonne creux
Comme une grande légende vide.
Il était une fois…
Est-ce qu’il est déjà une fin?
Il était une fois,
Il n’est plus une fois.
Pourtant, les demain continuent
De cogner à la porte.
Les demains.
Il sera une fois…
Ça se conjugue bien.
Il sera une fois,
Dans des horizons doux,
Un monde où l’amour
A pas trouvé sa putain,
Un monde où les cœurs se retroussent,
Haut et fort,
À se construire du grand et du solide,
À pleine face dans l’histoire,
À pleines gorgées d’appartenance,
À tirer dans les mémoires,
Là où la devise se souvient,
Pour se faire des lignes d’avenir,
Puis se donner la survivance.
On ira réveiller le vent,
Celui qui tient l’espoir et le cap.
Sur les mots puis dans les airs,
Dans le grand manche branlant
Avec quatre siècles d’erre d’aller…
Dites-moi qu’on fonce.
À la limite, s’il faut tomber,
On aura l’élégance de tomber ensemble.
Est-ce qu’il sera une fois?
Il sera des millions de fois.
Il sera sept millions de fois.
Puis l’histoire va reprendre de son aile
Puis son coin de ciel.
Il sera une fois…
Dans un pays lointain…
Juste de le dire
Déjà il est moins loin.
Il sera une fois
Puis on sera tous des géantes, des géants!
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Fred Pellerin - Le dernier des Québécois?
Sylvain Cormier, Le Devoir, 19 novembre 2011
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