lundi 12 septembre 2022

Catalogue

 


La gluance visqueuse


Essai décapant et satirique attaquant le monde de la sculpture, et en particulier les individus qui se prétendent des experts. L’auteur ne se cache pas – bien au contraire – pour s’afficher comme grand pourfendeur du snobisme et de l’élitisme hermétique qui entache actuellement – et peut-être depuis toujours – le monde de l’art. Il s’en prend surtout au rôle que les connaisseurs se sont arrogé, critiquant en fait leur refus systématique d’éduquer le public afin d’en affiner ses goûts en la matière. Selon lui, les critiques préfèrent de loin monopoliser la connaissance afin de s’approprier le droit unique, plein et entier de décider de ce qui ne se vendra pas, de ce qui trouvera acheteur et, surtout, à quel prix. L’auteur attaque particulièrement le rôle double et toujours ambigu de ces critiques qui servent en même temps de courtiers et d’experts. Il apporte d’ailleurs à l’appui de ses attaques quantité d’exemples prouvant que la supposée expertise de la plupart est d’autant plus douteuse que quantité de fraudes, que ce soit sur le marché de l’art ou dans le domaine muséologique, n’ont pu être rendues possibles que grâce à l’ignorance et au manque de discernement de ces experts qui, malgré tout, n’ont jamais été sanctionnés. Ainsi, l’auteur démontre que la sculpture, entre autres formes d’expression, est de moins en moins une affaire d’art ou même d’argent, mais surtout un vecteur garantissant le statut social d’une élite plus ou moins au fait, plus ou moins éduquée elle-même, mais totalement obnubilée par sa soif de pouvoir. Dès lors, cette élite ne cherche nullement à favoriser la recherche artistique, ou l’émergence de nouveaux genres, mais uniquement à perpétuer le contexte qui a permis à un groupuscule de s’approprier le monopole de l’évaluation et de la distribution des oeuvres. Sur ce chapitre, l’auteur est particulièrement acerbe lorsqu’il décrit, non comme des cas isolés, mais comme une pratique usuelle, le fait d’écarter systématiquement des vernissages et du mainstream de la sculpture de nouveaux artistes qui, bien que prometteurs, refusent de recourir aux services et, surtout, aux avis éclairés de la poignée de soi-disant critiques qui dictent à eux seuls les goûts de la masse et décident entre eux de l’orientation de la recherche artistique. À titre de preuve, l’auteur présente le cas véridique où, sous le couvert d’un prête-nom, il a exposé dans une galerie renommée des amas de silicone simplement jetés, la veille du vernissage, au hasard des présentoirs, « oeuvre » qui lui a valu des critiques dithyrambiques. Il présente en annexe une revue de presse et des lettres de félicitations signées par certains des critiques les plus en vue. L’auteur est journaliste dans un important hebdomadaire montréalais.


 – Guy Aumet – 218 p. – 1996 – La plupart de ses détracteurs ont reproché au journaliste son manque de mesure quant au ton employé dans cet essai. Cependant, aucun d’entre eux n’a jamais tenté de répondre aux arguments qui y sont présentés. Comme le mentionnait l’auteur lui-même à l’émission Lecteur, sur les ondes de Radio-Canada : « Qui ne dit mot, consent. »

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