vendredi 22 juillet 2022

Catalogue

 


Allez donc empêcher un être humain de faire le con


L’auteur, un journaliste habitué aux points chauds de la planète, lègue, maintenant qu’il goûte une retraite heureuse, son testament à la fois professionnel et philosophique. Fasciné par les tribulations qui ont caractérisé le siècle, il ne peut s’empêcher de s’interroger sur les mobiles profonds de l’âme humaine et d’en tirer des conclusions qui ne peuvent laisser personne indifférent. La démonstration qu’il élabore se fonde exclusivement sur des faits historiques relativement contemporains (depuis la Première Guerre mondiale jusqu’à nos jours). Surtout intéressé par les tractations de coulisse, mais néanmoins abondamment documenté, l’auteur épluche littéralement les motivations des décideurs qui furent à la fois les initiateurs et les victimes des événements qui ont forgé l’époque contemporaine. Après la Grande Guerre, il critique tout aussi sévèrement la politique franco-britannique de l’appeasement (en particulier l’accord Daucou, de sinistre mémoire) durant l’entre-deux-guerres. Il s’en prend également aux causes qui ont transformé un simple conflit frontalier européen en ce qui a été connu comme étant la Deuxième Guerre mondiale. Celle-là même qui a amené dans son sillage toute une série de conflits nationaux qui ont été pudiquement camouflés sous l’appellation « décolonisation ». Or peu d’événements dans l’histoire se sont répétés autant, depuis l’Asie jusqu’à l’Afrique, dans un laps de temps aussi court, sans que pour autant les pays colonialistes acceptent de tirer les leçons évidentes de leurs politiques. Au contraire, cette incapacité à accepter les faits, cet entêtement à vouloir les plier à des volontés héritées d’un autre âge vont culminer avec la guerre du Vietnam dont l’Amérique subira les cuisantes conséquences pendant des années. C’est au dernier chapitre de son essai que l’auteur explique quelle est la prémisse de départ de sa réflexion, une prémisse qui a germé dans son esprit au plus fort de l’offensive du Têt, alors que le haut commandement américain n’hésitait pas à affirmer qu’il fallait « bombarder les villes vietnamiennes afin de les sauver ». C’est au hasard de cette bourde, qui a braqué une part importante de la population contre l’occupation étrangère, que l’auteur a compris ce trait incontournable de l’âme humaine : quels que soient les avantages qu’une situation confère à l’une des deux parties dans un conflit, il existe toujours un pourcentage de chances pour que cette force se retourne contre celui qui en dispose. Jamais l’issue d’un conflit ou d’une lutte active n’est assurée. Dans tous les cas, il existe ce que l’auteur appelle le « Facteur C » (pour « croc-en-jambe ») et qui constitue le seul véritable incontournable de l’être humain.


 – Philippe Émault – 320 p. – 1991 – Le succès de son essai a obligé l’auteur à sortir de sa retraite. Il donne maintenant une série de conférences en Europe et au Québec afin de sensibiliser la population aux risques de la complaisance envers les détenteurs du pouvoir.


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