mercredi 21 octobre 2020

Le mot dit

C’est un mot qui rime avec vinaigre, mais que personne n’a le droit de prononcer. Désormais, il est interdit de parler du roman Comment faire l’amour avec un [n] sans se fatiguer; défendu – à plus forte raison parce que c’est politique – de lire [N] blanc d’Amérique; proscrit tout visionnage du film Le [n].

Bref, le mal n’est plus ce qui est derrière le mot – ce qu’il représente, quoi –, c’est le mot lui-même. Le racisme latent dont il est l’expression est ainsi, en bonne part, balayé sous le tapis, laissé dans cette obscurité où il ne peut que prendre de la force, comme un répugnant vampire.


C’est une névrose très contemporaine, laquelle consiste à refouler une chose plutôt que de la reconnaître et de la combattre. D’une part, c’est une solution de facilité; de l’autre, elle est conforme avec la dérive autoritaire vers laquelle glisse la société au nom d’une forme de respect que l’on cherche à imposer.


Dès lors qu’un groupe décide de ce qui est acceptable et de ce qui ne l’est pas, on ne peut échapper au crime par la pensée.


1 commentaire:

Unknown a dit…

On efface le mot, on efface le sens, on efface l'histoire. Est-on plus avancé?