Le monde est un cauchemar par épisode
Un homme jugé schizophrène est interné dans un hôpital psychiatrique. Sa seule activité en dehors de ses traitements, et encouragé en cela par son thérapeute, consiste à rédiger un journal où il consigne avec soin tous les détails de sa vie quotidienne avec une minutie incroyable, qu’il s’agisse de ses traitements, des événements qui ponctuent la vie de l’hôpital ou des visites de sa soeur, la seule personne prenant encore la peine de le visiter. Mais, plus important encore, il y rapporte les rêves qu’il fait la nuit. Dans le tiroir de sa table de chevet, il cache les objets qu’il trouve dans ses mains à son réveil et qu’il a rapportés de ses songes. À contrecoeur, il doit détruire chacun de ces souvenirs avant qu’ils ne soient découverts par une éventuelle fouille impromptue auxquelles se livrent les autorités de l’hôpital afin de saisir les articles interdits par le règlement. Comme ses rêves constituent son seul et unique moyen d’évasion, il craint que, s’il venait à être su qu’il vit réellement ces moments étranges, les médecins trouvent le moyen de le priver de sommeil. Sa vie, pourtant très régulière, commence à être modifiée par la récurrence d’un rêve en particulier. Au début, il se retrouve dans un pré, à l’ombre d’un saule près d’un ruisseau. Une femme qu’il ne connaît pas lui tend un verre de vin blanc et l’invite à s’asseoir près d’elle tandis qu’elle dispose les victuailles d’un pique-nique. Si, au début, le rêve se déroule toujours de la même façon, il commence très tôt à se modifier et les conversations qu’il a avec la femme suivent de nuit en nuit des fils très différents. Les infirmiers et les médecins s’aperçoivent bientôt des changements qui marquent leur patient : perte d’appétit le matin, gain de poids et, en une instance particulière, présence d’un taux relativement élevé d’alcool dans le sang. Cependant, à partir du moment où les autorités se posent de plus en plus de questions à son sujet, son rêve se transforme progressivement en cauchemar. La femme devient de plus en plus cassante, voire même agressive. Une nuit, elle le menace avec un couteau. À chaque occasion, elle semble de plus en plus dangereuse, à tel point que l’homme commence à craindre pour sa vie. Un matin, il se réveille avec une coupure au visage, ce qui déclenche l’inquiétude des médecins. Ils font alors appel à une spécialiste qui suit le dossier déjà depuis quelque temps. Lorsqu’on la met en présence du patient, celui-là reconnaît la femme de son rêve. Devant son désarroi, la femme demande à ce qu’ils soient laissés seuls. Il s’engage alors un huis clos entre la psychiatre et le patient où chacun tente de découvrir le secret de l’autre. À la fin de cet échange où la tension monte constamment, le patient attaque sa tourmenteuse qui n’a d’autre choix que de le poignarder pour sauver sa vie.
– Ève Adam – 282 p. – 1988 – Apologie du rêve éveillé, ou du sommeil trouble, ce roman aux prémisses improbables évite de verser dans le fantastique pour demeurer, grâce à l’incontestable talent de l’auteure, éminemment cohérent et rationnel. De ce fait, il parvient à susciter chez le lecteur une ambivalence vis-à-vis la réalité des choses.
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