Les pouvoirs en place ont constaté assez tôt que l'ancien clivage gauche-droite ne suffisait plus à contenir la grogne du bon peuple. Afin que le système se perpétue pour enrichir davantage la bourgeoisie, il fallait absolument que l'illusion démocratique fût maintenue. Or, justement, une désaffection de la part de la population menaçait entre autres les taux de participation aux élections, indicateur absolu de la foi que les gens entretiennent à l'égard du système politique, dont le système économique est le revers le plus intéressant pour les possédants.
Il a donc fallu adapter le discours de droite de manière à le maquiller suffisamment afin de lui faire perdre ses rides conservatrices, mais pas trop afin que, une fois porté au pouvoir, ses supporteurs ne puissent se sentir trahis chaque fois que les dirigeants écorneraient leurs promesses en faveur des mêmes vieux intérêts particuliers.
On a donc inventé la notion de «populisme», en politique. J'ai déjà, il y a longtemps, défini – très succinctement, il est vrai – les dirigeants populistes comme étant ceux qui profitent de l'ignorance du peuple, plutôt que de la combattre. Je ne renie en rien cette définition, mais j'aimerais tout de même l'élaborer un peu.
Les leaders populistes se présentent d'abord comme étant au-dessus des partis politiques. Ainsi, ils peuvent donner l'illusion de pouvoir se libérer des anciennes façons de voir. En quelque sorte, une des sous-catégories du populisme est le «transpartisme», ce qui permet aux formations politiques se réclamant de ce mouvement de ratisser les mécontents de la gauche à la droite, sans distinction. Et c'est justement le but visé: racoler sans vergogne.
Feignant de vouloir lutter contre les inégalités, ces leaders n'en demeurent pas moins – et comme par hasard – viscéralement attachés aux éléments qui induisent justement le plus d'injustice sociale. Il promeuvent à tous vents le libéralisme, l'économie de marché et restent très favorables à la mondialisation, quoique cette dernière, selon eux, devrait être réglementée afin d'en limiter les abus. Or, justement, toute forme de réglementation se situe aux antipodes du libéralisme auquel ils sont tellement attachés. Mais leur discours n'en est pas à une contradiction près, on ne le sait que trop. C'est ici qu'il devient des plus profitables d'encourager l'ignorance, plutôt que de la combattre.
Sous le vocable de «décentralisation», ils cachent essentiellement le projet de démanteler les États tels qu'ils sont dans leur forme actuelle, ce qui se marie à merveille avec un autre de leurs chevaux de bataille consistant à réduire les charges fiscales; pour les nantis, à tout le moins.
Mais ce qui est le plus amusant chez leurs porte-voix, c'est lorsqu'ils accusent leurs adversaires – souvent sincèrement de gauche, ceux-là – de «populisme», n'hésitant pas à utiliser ce terme comme une insulte, ce qui en dit long sur la valeur de leurs prises de position.
C'est un peu comme lorsque les fascistes d'autrefois prétendaient défendre la liberté.
jeudi 5 janvier 2017
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