lundi 24 janvier 2022

Catalogue

 

L’émoi de l’année


Homme de peu de besoins, Tancrède est un quadragénaire renfermé et distant. Peu sociable, il partage sa vie de reclus entre son violon d’Ingres, la chasse aux papillons, et son travail, la chimie des plastiques. Ayant peu d’amis et vivant seul, il passe, comme le disent ses voisins, son existence entre parenthèses. Dans cette vie trop rangée, uniquement consacrée au respect de cycles immuables, Tancrède recèle pourtant un étrange secret. Une fois l’an, alors que ses quelques proches le croient en visite chez une hypothétique tante, il se rend en fait dans la capitale pour passer quelques jours dans la plus abjecte débauche où, imitant en cela les personnages du marquis de Sade, il se livre à des joutes philosophiques. Ce temps, passé annuellement à l’accomplissement de tous ses plaisirs, il l’a surnommé « l’émoi de l’année », car c’est le seul moment où il reprend contact avec ses sens, quoiqu’avec un débordement malsain. Comme l’abandon est de mise lors de ses escapades orgiaques, il ne s’inquiète guère des contacts qu’il noue alors. Le plus souvent, il s’agit d’inconnus que, quoiqu’habitués de la maison close qu’il fréquente toujours, il ne revoit jamais. Cependant, au retour de son dernier « émoi », Tancrède remarque dans son train un visage familier. L’homme, qui le reconnaît également, est un de ses compagnons de débauche qui, comble de malheur, habite la même ville que lui. Incertain quant à l’attitude à prendre, il feint la curiosité distante quant aux activités de l’homme qui lui explique avec force détails les endroits qu’il fréquente et son lieu de travail. Lorsque les deux hommes se quittent sur le quai de la gare, Tancrède croit en avoir fini avec l’inconnu. Mais, quelque temps après, ce dernier passe chez lui. Cette visite impromptue est suivie de plusieurs autres, si bien que Tancrède se croit obligé d’expliquer à l’homme, qui se présente à lui sous le nom de Didier, qu’il préférerait qu’il cesse ses visites. Celles-ci sont alors suivies de coups de téléphone et de lettres à répétition. Agacé, Tancrède décide d’aller rencontrer l’homme chez lui, mais ni à l’adresse de retour indiquée sur les enveloppes ni là où il prétend travailler on ne le connaît. Inquiet, Tancrède commence à craindre le pire : l’oeuvre d’un maître chanteur. Au téléphone, il donne rendez-vous à Didier, lequel se présente à l’heure dite. Déterminé à couper les ponts avec l’encombrant personnage, Tancrède le prend en filature à la fin de la soirée. Avec horreur, il constate qu’il habite à deux pas de chez lui. Surpris par Didier alors qu’il fouille sa chambre, il apprend que les avances amicales de l’étrange individu ne sont en définitive qu’une tentative de briser leur solitude commune.


 – Jacob Brillolay – 274 p. – 1992 – Intéressante analyse de l’univers du solitaire, de ses manies et de ses phobies, ce roman se démarque du genre en employant un ton particulièrement riche et fleuri auquel se prête parfaitement la langue.

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